Détour

Géraldine était venue bien avant l'aube au campement, d'un pas d'abord décidé puis de plus en plus nostalgique elle s'était dirigée vers la tente de Zeratul, sans un bruit. Elle s'arrêta devant celle ci et, laissant à peine échapper un léger froissement de parchemin, extirpa un petit paquet de sa besace.

Lorsque le jour se lèverait, le Commandeur Céleste avec lui, Zeratul découvrirait un objet enveloppé dans un chiffon blanc avec dessus, un parchemin roulé cacheté du sceau de la mage. Une fois le chiffon déroulé, il verrait apparaître son symbole de la lumière céleste, intact, preuve de la possible délicatesse de Géraldine. La lettre disait ceci:

"Cher Zeratul, je te demande de lire cette lettre à tous les membres du G.A.R.D.E., je vous fait mes au revoir, désolé de ne pas avoir eu le courage de vous le dire en face mais j'avais peur de ne pas réussir à faire ce que je dois faire, et puis le temps me manque...

Je dois donc m'éloigner de vous, mais je serais toujours joignable par courrier, mon fidèle oiseau me trouvera au bout du monde, même au plus haut des Cieux ou au plus profond de la Terre...

Je vous expliquerais plus tard, plus longuement l'objet de mon départ, mais cette lettre n'est pas faite pour cela, elle est faite pour que je vous exprime toute l'affection que j'éprouve pour vous, à tous ceux présents et à la plupart de ceux qui sont partis...

Que Dieu vous G.A.R.D.E. mes amis! Puissiez vous défendre dignement Ses couleurs et les faire triompher!

Géraldine

PS : Zeratul, embrasse Cybella pour moi et veille sur elle.
Dis à ScarniX d'être sage et de ne pas trop se laisser distraire par les angèles..."

Géraldine, une fois son paquet déposé, se dirigea vers la volière, et parti seulement accompagnée de son oiseau or et feu, regrettant que Kenbor ne soit plus avec elle...

Cela faisait maintenant plus d'une semaine que Géraldine s'était mise en route, la solitude lui pesait en même temps qu'elle la réjouissait, car après tout elle était sa vieille amie... Avant de rejoindre le G.A.R.D.E., elle avait longtemps erré seule ou accompagnée pendant quelques jours par une rencontre de fortune ou encore parfois plus longuement par un allié occasionnel jusqu'à ce que la lame d'un démon ou d'un humain perverti sépare le petit groupe ainsi formé. Bizarrement elle se sentait presque libérée, libérée de la crainte de voir l'un de ses compagnons mourir, plus encore de la crainte de commettre une erreur dont les conséquences seraient fatales à l'un d'entre eux.

Elle aimait combattre seule, être le prédateur, seule face à sa proie, n'ayant aucun autre soucis que sa traque, sa bataille, sa mort ou celle de son ennemi, souvent celle de son ennemi d'ailleurs... Mourir ou tuer, tuer ou mourir... Si seulement sa tâche avait été aussi simple que ça... Mais Il ne souhaitait en arriver là que lorsque la rédemption était impossible, que lorsque Ses souhaits étaient irrémédiablement bafoués.

De toute manière ce départ n'avait malheureusement pas pour objectif de faire respecter Sa volonté, pas dans l'immédiat du moins et c'est la raison pour laquelle durant ces derniers jours, sa lame faiblissante ne rencontrait plus que la chaire de jeunes êtres dont l'âme avait quitté le corps... Sa lame n'aurait peut-être pas de toute manière supporté le choc de ces larges et épaisses lames qu'affectionnaient les hérétiques de la Compagnie Sombre...

Car la seule et unique raison était en réalité l'état déplorable de son arme, elle n'avait osé donner immédiatement la raison de son départ car elle craignait de rencontrer l'incompréhension voire même l'agressivité de ses amis de par leur ignorance quand à la nature d'Altaïr, sa merveilleuse épée, si ce nom n'était pas trop péjoratif pour une si grande merveille...

Il était maintenant temps d'expliquer la raison de son départ à ses frères et soeurs... Elle décida de profiter de cette pleine pour leur écrire cette lettre:

"Mes amis,

Je vous dois quelques explications quand à mon départ précipité, ceci est une longue histoire que je ne pourrais peut-être pas conter en une seule missive, d'autant plus que je dois profiter de ma courte nuit avant de repartir demain à l'aube si je veux pouvoir réaliser mon but.

Tout d'abord je dois commencer par le début, ma naissance..."

Et de sa plume d'oie blanche, tenue par ses jolis doigts graciles lorsqu'ils traçaient lettres et runes mais pourtant si ferme au contact d'une arme, elle leur raconta donc comment après la mort de son démon de père et la fuite d'Artémis sa mère, la vieille dame à qui sa génitrice l'avait confiée, craignant à juste titre qu'elle ne survive pas aux neiges glaciales de Grand Rock Mountain, comment donc Aêna l'avait élevée... Artémis malgré son départ précipité n'avait pas confié la charge de son enfant à la première inconnue rencontrée mais à une personne dont le nom n'était pas inconnu dans certains milieux et qui plutôt que le nom de sorcière, comme la majorité des pratiquantes de l'Art dans son cas, avait gagné auprès des villageois du bourg l'appellation de fée. C'est donc en ces lieux reculés, peu au sud des grandes montagnes qu'elle avait appris les bases de son savoir magique. Et c'est en cet endroit que plusieurs années après son arrivée, lors de son dix-septième anniversaire, Aêna, plus que centenaire, et sentant sa dernière mort approcher, lui offrit la lame avec laquelle elle combattit le reste de sa vie durant, lame unique...

Réprimant un bâillement elle finit sa lettre par ces mots :

"... l'heure avançant, je ne puis continuer ce soir. Mais avant de vous quitter je finis par ces mots : c'est pour réparer l'épée qui est mienne que je suis partie. Croyez moi, aucune autre lame n'aurait pu la remplacer, pas même celle du premier Archange...

Avec toute mon amitié,

Géraldine."

Elle apposa son paraphe, au-dessous de son nom, roula le parchemin qu'elle cacheta de son Sceau puis l'accrocha à l'une des pattes de son oiseau. Il s'envola face aux lunes, ombre feu et or devant les disques plein des planètes si chères aux yeux de sa mère Artémis...

"
L'épée aux Milles Noms

Cette épée est l'une des plus étranges qu'il soit, cela tenant également, en plus de son histoire et de ses propriétés, du fait que sa genèse assez méconnue laisse une grande place à l'imagination. Nombre de lames sont hantées par un esprit mais seulement très peu de ces esprits s'évertuent à propager le bien, la plupart d'entre eux donnant à la lame une volonté sanguinaire allant jusqu'à pousser son propriétaire au meurtre gratuit dans le seul but d'étancher pendant quelques temps la soif de l'épée. Celle ci agit différemment, elle n'impose jamais sa volonté à son propriétaire, tout au plus propage-t-elle un aura positif. Par contre, c’est elle qui choisit son propriétaire. Plus exactement, cette lame laisse son propriétaire précédent la léguer au suivant qui doit en être « digne » sous peine de voir l'épée disparaître. En effet, celle ci semble s'être déjà rematérialisée en un autre lieu pour échapper à un nouveau propriétaire qu'elle ne jugeait pas « digne » . Cela étant elle ne peut semble-t-il plus quitter son propriétaire jusqu'à sa mort ou jusqu'au moment ou ce dernier décide de la céder au suivant selon un rituel qui sera détaillé ultérieurement.

Je vais pour l'instant vous relater la légende qui raconte la naissance de cette lame, celle ci étant très peu célèbre, je n'ai pu en avoir que quelques versions qui ne m'ont pas permises un recoupement efficace, par conséquent, je ne peux que me fier à la sincérité des récits qui m'ont été transmis. En voici la synthèse:

« Il y a de cela très longtemps, peut-être même peu après l’avènement du premier Archange ou du moins au plus tard un siècle après celui-ci, alors que la plaine de Fangard était alors déjà le théâtre d’affrontements sanglants, luttait là-bas un Seigneur local contre les hordes démoniaques dont les rangs grossissaient. Sa politique et celle des humains habitant cette région n’était pas tellement différente de celle de la FIN actuelle, si la guerre qu’il menait était dirigée contre les légions infernales, il n’en reste pas moins que les anges n’étaient pas les bienvenues sur ses terres. Ce Seigneur avait alors une fille unique nommée Éléa en âge de se marier. Très jolie, sans l’être non plus à outrance, elle était par contre d’une intelligence redoutable et repoussait chaque soupirant, au grand dam de son père, dans le but de prendre sa succession, chose normalement réservée à un homme. Mais l’amour, implacable, la pris dans ses rets... Au cours du bataille contre une faction démoniaque, l’armée humaine mise en difficulté fut séparée, la bataille, d’abord rangée, devint alors un ensemble de duels à deux ou à trois, guère plus. La fille du Seigneur se retrouva donc seule face à deux démons lorsque le hasard fit l’un de ses miracles... Altaïr ange de son état qui comptait aller défendre la parole divine en Fangard, entendant parler d’un front s’était dirigé vers les lieux. Il tomba alors littéralement (les aléas de la porte paradisiaque n’étant pas nouveaux) sur le trio en pleine bataille. Et voyant un être en difficulté face à deux démons, s’avança pour l’aider. Après avoir vaincu les démons, l’armée humaine ayant subie de lourde perte se retira, l’ange Altaïr fut considéré comme un invité d’honneur et reçu une lame de très belle facture, comme en ont toujours su faire les forgerons de cette région, en récompense d’avoir sauvé Éléa. Mais l’ange après s’être rendu compte que le guerrier qu’il avait secouru était en réalité une charmante demoiselle en tomba éperdument amoureux, amour qui fut réciproque. Et après que le Seigneur ait surpris Altaïr dans la chambre de sa fille, ce dernier du quitter la contrée au grand dam de sa dulcinée. Éléa ne pouvant supporter la douleur de la séparation s’enfuit du château pour voyager aux côtés de son amant. Il fût alors, des semaines plus tard, un jour funeste, après que l’ange et l’humaine aient essuyé de nombreux combats ensemble, où les ennemis arrivèrent trop nombreux pour que tout deux survivent... Les démons au nombre de dix (NdlA : il est probable que ce fut moindre mais la légende est toujours plus belle ainsi...) assaillirent violemment les deux amants qui malgré les blessures de plus en plus nombreuses tuèrent neuf de leurs assaillants. Mais malheureusement, la Mort veillant à l’équité, le dixième réussi à porter un coup fatal à Altaïr qui tomba à genoux, mortellement blessé. Le démon encore relativement épargné par le combat s’avança, un rictus aux lèvres, s’approchant d’une Éléa épuisée, s’apprêtant à tuer son deuxième adversaire lorsque Altaïr usa de ses dernières forces pour planter la lame dans le dos du démon qui, dans un râle surpris, s’effondra, mort. Altaïr dont les yeux devenaient vitreux tourna sa tête vers une Éléa effondrée, et, faisant l’ultime effort d’un dernier sourire, lui souffla ces paroles : « Je veillerais sur toi, toujours, même dans la mort... même dans la mort.... » Et c’est alors que l’on assista à un étrange phénomène. Du corps ensanglanté de l’ange se diffusa une faible lumière bleutée, lumière qui devint de plus en plus intense jusqu’à être presque palpable. L’âme d’Altaïr s’extirpa de son corps et se dirigea vers son épée, s’intégrant dans la lame. Celle ci s’éclaira brièvement d’un très vive lumière, brûlant le corps du démon dans lequel elle était encore plantée. Éléa rattrapa l’épée avant qu’elle ne heurte le sol et en pleurs, elle murmura : « Oui... Tu ne me quitteras point... » Jamais plus le nom d’Altaïr ne fut prononcé et jamais il ne devra l’être en présence de la lame sous peine d‘une effroyable chose dont je n‘ai pu avoir connaissance malgré toute mon insistance... A partir de ce jour, chaque année, Éléa se rendit sur les lieux du triste événement et chaque fois la rune qui s’était inscrite sous la garde, sur le plat de la lame, s’éclairait d’une lumière bleutée, la gravure semblant se renforcer. Éléa retourna auprès de son père, ne se maria jamais et devint Seigneur (chose notable compte tenu des moeurs de l‘époque). Altaïr resta présent à son côté jusqu‘à sa mort et jamais un règne ne fut plus heureux malgré les guerres. »

Voici donc comment m’a été conté l’histoire de cette lame, de par ceci l’épée a acquis d’étranges propriétés ainsi que notamment le besoin d’être restaurée d’une façon particulière. Chaque mort de son propriétaire fait perdre à la lame une partie de l’âme du défunt Altaïr, cette partie retourne à son corps toujours enterré dans la plaine de Fangard, le dessin de la rune s’affaiblit d’autant à chaque perte, il peut ainsi servir de témoin quand à la fragilité de l’épée...

Le texte continuait ainsi pendant plusieurs pages. La plupart de ce qui y était écrit était déjà connu de Géraldine mais elle ignorait tout de même encore beaucoup de renseignements très intéressants au sujet de sa précieuse lame, beaucoup trop en tout cas pour s’arrêter de lire avant d’avoir terminé le chapitre. Elle avait bien avancé, elle connaissait déjà presque le lieu où elle devrait se rendre pour redonner à Altaïr sa puissance originelle, mais elle devrait tout de même rester encore, au moins une journée de plus, pour savoir où avec précision où se situait l‘endroit, car elle ne pourrait sillonner Fangard de long en large en espérant être guidée par la chance...

Deux semaines plus tard...

Géraldine ayant récupéré toutes les informations nécessaires à la restauration des pouvoirs de l'épée, n'avait plus eu aucune raison de rester à la tour. Elle s'était donc mise en chemin sans avoir pour autant oublié le tonneau de Déchéance qu'elle destinait à quelques expérimentations. À seulement quelques lieux de la sortie de la Tour elle eût la surprise d'apercevoir une petite ferme... Mais qui donc habitait dans ce coin reculé ? La mage, surprise mais toujours curieuse, alla frapper à la petite porte en chêne qui semblait être l'entrée principale de la jolie demeure au toit de chaume. Une très jolie angèle ouvrit l'air aussi surprise qu'elle de voir quelqu'un de vivant en cet endroit. Elle sembla méfiant jusqu'à ce qu'elle aperçut l'emblème du G.A.R.D.E. agrafé sur la cape de Géraldine, ce qui valut à cette dernière un sourire et une invitation à faire une halte autour d'un verre ou d'une tasse...

Les deux angèles sympathisèrent vite et bavardèrent assez longuement pour que l'aimé d'Aryline, puisqu'elle se nommait ainsi, revint à son logis sans en avertir une Géraldine surprise qui porta la main à la garde de son épée prête à s'en servir contre l'intrus. Mais avant qu'elle ait pu esquisser un quelconque autre geste, Aryline vint poser délicatement sa main sur le poignet de la guerrière et désignant le grand démon qui leur faisait face dit : "Voici mon compagnon! Apocalypse..."


A suivre...

hrp/ Attention ce dernier paragraphe étant en cours d'ébauche, la véracité des informations RP y figurant n'est pas garantie./hrp