Rédemption.

Cybella franchit les portes du campement. Elle hésita un moment, si Zeratul la savait seule dehors, il se ferait un sang d'encre… Mais après tous ces évènements, elle avait besoin d’un peu de solitude.
Elle laissa son regard se promener sur les environs, tout semblait calme en cette fin de journée. Le soleil, au travers de fins nuages blancs, luisait comme des flèches de lumière dorée qui se posaient ça et là, éclairant particulièrement le jeune arbre couvert de fleurs roses qui trônait, solitaire, au sommet de la petite colline, non loin de là.
Elle déploya doucement ses longues ailes de peau sombre et alla se poser au pied de l’arbre où elle s’assit, épuisée, dans l’herbe tendre parsemée de petites fleurs jaunes et blanches, appuyant son dos contre le jeune tronc …

Les yeux fermés, elle caressait tendrement son ventre à la peau tellement tendue que cela en devenait presque douloureux. Le moment était proche maintenant, le moment de la délivrance, le moment de la séparation …
Elle avait tout accepté jusqu’à maintenant, tout renié, tout rejeté de son passé … restait cet enfant.
Plus rien maintenant ne la liait aux Enfers, si ce n’était ce petit bébé qui bougeait en elle, ce petit être innocent dont elle allait devoir se séparer à jamais.

Seule, elle laissa enfin couler ses larmes sans retenue, laissant enfin exploser toute la douleur qui habitait son cœur de future mère.

"POURQUOI ? Pourquoi ?"

Elle ouvrit les yeux et les tourna vers le ciel… Vers ce ciel où se portaient leurs regards lorsqu’ils LE priaient … Vers ce ciel où ils disaient qu’IL se trouvait.
Elle les avait observé mais elle n’avait encore jamais osé LUI parler. Crainte ancestrale ? Peur viscérale d’être foudroyée sur place ? Elle n’aurait pu le dire … Mais ce qu’IL exigeait maintenant était trop dur, il fallait qu’elle le LUI dise.

"TOI ! Là-haut … Je ne sais pas si tu m’écoutes, je ne sais même pas si tu m’entends.
J’ai fais tout ce qu’ils me demandaient, tout ce qu’ils exigeaient. J’ai tout laisser tomber, tout renié : ce que j’étais, ce que je faisais … Mes sœurs, mes amis … Les Enfers.
J’aime Zeratul d’un amour que je ne croyais même pas pouvoir exister. Je lui ai donné mon cœur, mon corps et mon âme et lui m’a montré la Lumière et m’a aidée à m’en rapprocher.

Maintenant, ils veulent que j’abandonne la seule chose de bon que je n’aie jamais eue … Mon enfant !

Pourquoi ?

Il naîtra pur et innocent ! Pourquoi veux-tu me l’arracher ?
Parce que il est de … de lui ? Du seul ange pur que j'ai aimé ?
Parce qu’il est un reste de mon passé ?"

Cybella ferma les yeux à nouveau … Des larmes coulaient sur ses joues.
Les rayons dorés du soleil se déplaçaient au gré des mouvements des nuages poussés par le vent léger … L’un d’eux vint lui caresser le visage, séchant ses larmes, réchauffant son cœur …
Elle ouvrit les yeux, soudain aveuglée par la lumière du soleil … Cette lumière semblable à celle qui se dégageait du médaillon de Zeratul …
Son cœur se mit à battre plus vite … Son enfant tressaillit soudain tellement violemment que cela lui arracha un petit cri de douleur …

"Si c’est ce qui doit être fait … Je le ferais.
Mais, s’il te plaît, ne les laissent pas me l’arracher ainsi ! Laisse-moi le temps … Laisse-moi le voir, le toucher, lui parler … Laisse-moi lui dire.
Et lorsque je ne serais plus prés de lui pour le protéger, s’il te plaît, ne l’abandonne pas, veille sur lui, fais qu’un jour il puisse profiter lui aussi de la chance qu’il m’a été donnée de revenir vers TOI !"

Un ange apparut à l’extérieur du camp. Le garde avait dû alerter Zeratul. Il s’envola et vint vers elle.
Elle sourit. Elle imaginait son visage fermé et ses yeux noirs qu’il essayerait de rendre furieux … alors qu’il était mort d’inquiétude !
Elle était calme maintenant et lorsqu’il se posa à coté d’elle, elle lui tendit les mains …

"Viens mon ange ! Viens dans mes bras."

Puis dans un murmure.

"Je t’aime..."

Légèrement essoufflé, Zeratul n'attendit pas une seconde de plus pour aller auprès de Cybella, maintenant qu'il l'avait enfin retrouvée. S'asseyant près d'elle, il la prit dans ses bras et la serra tendrement.

- Cybella... enfin je te retrouve. Les gardes t'ont vu quitter le campement seule. Je me suis tant inquiété pour toi, si tu savais...

Elle lui caressa tendrement la joue et se blottit au creux de ses bras.

- Je ne craignais rien mon coeur, je n'étais pas loin. J'avais juste besoin d'être un peu seule pour réfléchir. Il y a tant de choses qui changent pour moi, en ce moment.

L'ange lui répondit dans un doux murmure.

- Je sais.

Passant doucement sa main sur la joue de Cybella, il la fit le regarder. Et lorsque leurs regards se laissèrent plonger l'un dans l'autre, Zeratul su lire la tristesse dans les doux yeux sombres de la succube...

- Mon aimée, tu... tu as pleuré?

- Oui … Mais …

Elle ne savait comment lui expliquer tout ce qu’elle ressentait. C’était tellement étrange, tellement nouveau pour elle.
Elle le regarda d’un air soudain très sérieux.

- Apprends-moi à LUI parler … pour qu’IL m’entende.

- LUI...?

- Tu souhaites... LUI parler? Parler à Dieu?

L'ange la regarda d'un air intrigué, mais son regard se voulait apaisant. Elle leva les yeux vers le ciel, vers l’endroit d’où venait le rayon de soleil qui avait caresser son visage …

- Tu crois que ça ne m’est pas possible ? Tu crois qu’IL ne m’entend pas ?
Pourtant …

Elle caressa du bout des doigts le médaillon, à la ceinture de Zeratul …

-… Pourtant c’était la même lumière … chaude et apaisante …

Zeratul suivit des yeux la main de Cybella qui vint effleurer son symbole de la lumière divine, puis leva les yeux vers les cieux d'un air pensif.

- La lumière...

Il continua à parler tout en fixant le ciel bleu.

- Tu as choisi la Lumière en quittant les Enfers à jamais...
Tu as choisi Sa Lumière et tu es donc sur la bonne voie. Ainsi, malgré ta nature Cybella, si ta volonté est grande, si tu as foi, et si es sincère dans les paroles que tu Lui adressera...

... Il t'entendra.

- Alors … Je crois qu’IL a entendu.

Elle posa soudain la main sur son ventre devenu dur et, fermant les yeux, tenta de cacher une grimace de douleur.
Elle ne voulait pas bouger. Pour une fois qu’ils étaient un peu seuls tous les deux depuis qu’ils étaient arrivé au GARDE, elle voulait en profiter un peu.

- Est-ce qu’IL te répond à chaque fois ?

L'ange reporta son regard sur Cybella.

- Dieu sait écouter les êtres qui croient en Lui et qui ont foi. Mais Il n'intervient que rarement. Uniquement lorsqu'Il le juge nécessaire. Je…

Zeratul regarda son aimée et posa sa main sur la sienne, sans pour autant toucher son ventre rond. Il lui sourit doucement en disant.

- Il m'a aidé à me rapprocher de toi et à te faire voir la Lumière et sa beauté.

- Pourquoi m’a-t-IL choisie … moi ?

Zeratul détourna légèrement les yeux et fixa l'horizon lointain devant lui.

- Il t'a choisie... probablement parce qu'il a lu dans ton coeur et a vu de l'amour...
Mais aussi pour te tirer des Ténèbres dans lesquelles tu as vécu autrefois et pour te ramener vers la Lumière...

Pour un future meilleur.

Elle détacha sa ceinture qu’elle ne savait soudain plus supporter sur son ventre et la regarda d’un air étrange en murmurant …

- Les Ténèbres et la Lumière …

Elle y glissa les doigts et en sortit deux plumes qu’elle lissa instinctivement … Une plume noire et une plume blanche.

- La plume noire est mon passé. Noire comme mon âme, noire comme les Ténèbres.
Elle ne représente pas seulement Heroneus mais tout ce que j’ai été.
La plume blanche est mon avenir. Blanche comme ton âme, blanche comme la Lumière.
Elle ne te représente pas seulement, mais elle est tout ce vers quoi je veux aller.

Elle lui tendit la plume noire …

Tu m’as sortie des Ténèbres … Ne me laisse jamais y replonger !

Zeratul ne quittait pas Cybella des yeux, et suivit du regard le moindre de ses gestes... jusqu'à la révélation des deux plumes d'anges qui semblaient être en pleine opposition. L'ange fronça les sourcils et écouta la succube parler, tout en fixant les deux plumes qu'elle tenait. Lorsque le nom de Heroneus fut prononcé, il détourna le regard en fermant les yeux quelques instants..

Rouvrant enfin les yeux, Zeratul tourna la tête vers Cybella en laissant son regard plonger dans le sien. Puis il baissa les yeux vers la plume noire qu'elle lui tendait et observa longuement celle-ci, sans dire un mot.

Lentement il tendit la main à son tour, hésitant, et prit doucement la plume sombre et impure dans sa main.

- Et il en sera ainsi, Cybella. Tu t'es détachée des Enfers, tu as renié ta nature et tu as rompu tout lien avec ton passé... Tu as fait ton choix, et tu en as beaucoup fait pour arriver jusqu’à là.
Quoi qu'il arrive désormais, jamais je ne te lâcherai, jamais je ne t’abandonnerai. Je te garderai toujours dans la Lumière, auprès de moi…
…et loin des Ténèbres...

Avec ces mots, la plume noire se brisa brusquement entre les doigts de Zeratul, jusqu’à ce qu’elle soit totalement écrasée, et l'ange la lâcha enfin pour la laisser tomber négligemment à terre.

Je serai toujours à tes côtés, pour le reste de l’éternité et je tiendrai ma promesse envers toi jusqu’à dans les limbes et au-delà.

Je t’aime Cybella… je t’aime plus que tout au monde. Tu es devenue ma raison de vivre. Sans toi… ma vie ne serait rien.

L’ange plongea alors son regard bleu au plus profond de celui de son aimée.

- Je t’aime moi aussi Zeratul … Je t’aime plus que tout.
J’ai confiance … Je sais que tu seras toujours auprès de moi.

Elle remit la plume blanche dans sa ceinture et posa ses lèvres tendrement sur les siennes … Quand ses mains se crispèrent sur son ventre …

Le bébé ! … Le bébé …

Ayant à peine senti les lèvres de son aimée sur les siennes, Zeratul fixa soudain le ventre rond de la succube, puis son regard chercha instinctivement le sien.

- Cybella! Ne bouge pas, je vais t'amener dans le camp.

L'ange se redressa rapidement et, mettant un genou à terre, prit délicatement Cybella afin de la porter dans ses bras. Elle serra ses bras autours de son cou et le regarda, des larmes pleins les yeux …

- J’ai peur … J’ai tellement peur.

- N'ai pas peur, mon aimée, mon amour, je suis là, avec toi.

Lentement l'ange déploya ses ailes d’un blanc éclatant et s'envola doucement vers le Camp retranché du G.A.R.D.E, en serrant Cybella fort dans ses bras.

Un ange en plein vol apparut à l'horizon et se dirigea vers l'entrée du Campement en toute vitesse. Quelques rayons de soleil reflétés par un médaillon qui pendait à sa ceinture prévinrent les gardes de l'arrivée de Zeratul. Les bras noués autour de son cou, les yeux fermés, Cybella se serrait fort contre lui.

Ils arrivèrent enfin au Poste avancé du G.A.R.D.E, et Zeratul se posa doucement sur le sol tout en continuant à marcher et en portant Cybella dans ses bras, tandis que ces ailes d’un blanc éclatant se replièrent. Il s'approcha des gardes en disant.

- « Allez retrouver le Général Raziel et les autres membres du G.A.R.D.E immédiatement, c'est urgent! Dites-leur que je les attends ici et aussi que... le moment est venu!

Que les autres gardes préparent une tente à l'entrée du Camp pour qu'elle puisse y accoucher!

Je vous prie, faites vite! »

Géraldine et Kariel furent les premiers à proposer leur aide mais, un accouchement n’était pas une chose habituelle au G.A.R.D.E. et ils ne savaient trop quoi faire pour aider, alors que Cybella, toujours dans les bras de Zeratul, gémissait de douleur.

L’accouchement n’était pas leur seul problème. Les puissances démoniaques avaient eu connaissance de la naissance proche. Il fallait que la succube et l’enfant meurt …
Le démon Guérison s’acharna alors, par des sorts de plus en plus noirs, à plonger dans les Ténèbres le campement et ses occupants, sorts qui furent, à chaque fois contrecarrés par la puissance de la Lumière.
Géraldine fut la première à ressentir cette présence néfaste et lança immédiatement un contre sort dont la magie protectrice entoura le camp. Protection encore augmentée par le symbole de la Lumière Divine dressé haut vers le ciel par Zeratul, très vite rejoint par la puissance du même symbole dressé par Enuriel. L’arrivée protectrice du Général Raziel anéantit enfin tout espoir de réussite du démon qui malgré tout, tenta encore d’atteindre la future mère.

Zeratul pouvait maintenant conduire son aimée dans la tente préparée par Géraldine.
Il allait l’installer sur le lit quand elle poussa un cri, se pliant en deux, les mains serrées sur son ventre. La douleur lui torturait les entrailles, semblant se répercuter dans chaque partie de son corps. Elle ne s’atténuait pas cette fois, la faisant chanceler sur ses jambes.
Quelque chose de chaud coula le long de ses jambes, formant entre ses pieds une petite flaque d’eau teintée de sang …
Son enfant serait bientôt là maintenant.
Elle se cramponna au bras de Zeratul qui l’aida à s’allonger. Elle l’attira vers elle, plongeant dans son regard ses yeux sombres baignés de larmes.
Elle respirait de plus en plus vite … de plus en plus fort tandis que son front se perlait de sueur.

- « Sois sans crainte, Cybella, et économise tes forces.
Je serai auprès de toi... »

Zeratul jeta alors un regard sur la flaque d'eau que la succube avait laissé. Le moment était maintenant venu pour cet être qu'elle portait dans son ventre de voir la lumière du jour... avant de...
L'ange secoua brièvement la tête et reporta de nouveau toute son attention sur Cybella.
Il n'avait pas à s'inquiéter pour l'ennemi qui les poursuivait, il avait confiance en ses frères d'armes et savait qu'avec la présence d'Enuriel, Raziel, Géraldine, Kariel, ScarniX et avec celle des autres membres, le campement était en sécurité, faisant une barrière divine contre tout sort maléfique qui viserait l'un d'entre eux. Les sorts ennemis pénétrant dans le Camp devenaient rapidement impuissants...

L'ange se redressa légèrement et prit une très légère et très fine couverture qu'il utilisa pour couvrir une partie du corps de Cybella.
Puis, Zeratul, un peu gêné, glissa les mains sous cette même couverture et aida son aimée à enlever son bas afin d'ouvrir le passage à l'enfant à naître. Une goutte de sueur coula tout le long de la joue de Zeratul alors qu'il accomplissait cette tâche.

Une fois cela fait, de nouveau il prit la serviette avec laquelle il essuyait régulièrement et avec soin les gouttes de sueur qui perlaient sur le front de Cybella en lui tenant la main.

- « Ce sera bientôt fini, mon amour...
Je suis auprès de toi et je tiendrai ma promesse...
La promesse de ne te quitter jamais et de ne jamais te laisser replonger dans les Ténèbres...
Cybella, ma succube aimée, bientôt tu seras soulagée et je serai là pour prendre soin de toi... »

Les paroles de Zeratul l’apaisaient un peu quand son corps se tordit soudain sous la douleur. D’antiques instincts guidèrent alors les gestes de la succube. Elle se redressa et agrippa ses genoux de ses mains et, retenant son souffle, poussa au plus fort de ses forces afin d’expulser d’elle cette vie qui ne demandait qu’à être.
A bout de souffle, elle retomba en arrière, agrippant la main de son ange.

- « Il faut que tu regardes … il le faut … je dois savoir … si ça va.
Regaaaaaaaarde !!! »

Mais déjà elle s’était redressée et à nouveau, cramponnée à ses genoux, poussait de toutes ses forces.

- « Aaaaaaaaaahhh !!! aide-moiii !!! »

L'ange se redressa alors en posant brièvement son regard dans les yeux humides de la succube et alla se placer à l'extrémité de lit où elle avait posé ses jambes. Doucement il souleva la légère couverture et soudain son coeur s'arrêta en voyant la tête de l'enfant à naître.

- « Oh Seigneur...
Cybella, je le vois, tu dois faire encore un effort pour qu'il puisse sortir.
Un dernier effort Cybella, nous y sommes presque maintenant.

Cybella se laissa encore une fois retomber, cherchant son souffle. Elle adressa un pâle sourire confiant à Zeratul …
Dans un hurlement de rage, elle se redressa une fois encore … Cela devait être la bonne, elle était à bout de force.

Le hurlement se transforma en sombre grognement, faisant trembler la tente … Dans cet effort, elle sentit son corps comme s’ouvrir en deux, se déchirer dans une douleur extrême. Se libérant soudain, l’enfant glissa vers les mains de Zeratul …

Au moment où l'enfant quitta le ventre de sa mère, Zeratul ouvrit grand les yeux et le reçu dans ses mains. Un pleur d'enfant se fit entendre et l'ange resta ainsi quelques instants à regarder la créature qu'il tenait entre ses mains...

De nouveau sa vue commença à se troubler tandis que les battements de son coeur avaient accéléré le rythme... L'air qu'il respirait lui était insuffisant et sa respiration se faisait rapide...

Lentement il sortit Lightbringer de son fourreau et en plaça la lame sur le cordon ombilical qu'il coupa ensuite. Puis, l'ange rangea son épée et, tenant le nouveau né entre ses mains, il le souleva haut pour le regarder brièvement et prit une serviette qu'il enroula autour de l'enfant.

Enfin il s'approcha de Cybella et lui tendit le nouveau né avec les mots.

- « C'est une fille... »

Cybella prit doucement l’enfant dans ses bras, épuisée et émue. Doucement, elle caressa son petit visage, dessinant du bout des doigts les moindres détails de sa petite frimousse, admirant ses lèvres rouges et fines, son petit nez mutin … se noyant dans ses grands yeux d’un bleu si pur, passant la main sur ses douces petites boucles blondes.
Elle découvrit son petit corps à la peau si douce et si blanche. Elle en examina chaque parcelle, la trouvant parfaite.

Elle était si belle … on aurait dit un ange, un petit chérubin. Mais Cybella savait qu’elle n’avait pas grand-chose d’angélique.
Doucement, elle la souleva, la dressant contre elle, et bougea la serviette découvrant deux minuscules ailes de plumes … noires.

Sa petite fille était une petite succube … Une petite succube semi-déchue.

- « Heronya … Tu t’appelleras Heronya mon ange ! »

Elle la serra tendrement contre elle, la couvrant de baisers … Laissant ses larmes inondés son visage …

Ils l’avaient enfin laissée seule dans la tente avec son bébé. Elle la serrait contre son corps, la berçant doucement, ne tentant même plus de retenir ses larmes.
Elle regardait sa petite fille, la caressant doucement, la respirant … voulant imprimer dans sa mémoire le moindre détail de ces trop courts instants qu’elle passerait avec elle. Elle caressait ses petites boucles blondes, son visage à la peau si douce et si blanche, ses lèvres rouges et ce petit nez mutin … Deux grands yeux d’un bleu si pur la regardaient par moment avec curiosité.

Avec beaucoup de douceur, elle tourna la tête du bébé vers l’un de ses seins durs et gonflés de ce lait qui lui était destiné … et qui allait sécher et se tarir faute de pouvoir lui servir.
Heronya s’en saisit avec force et téta avec appétit le précieux liquide.

Bois mon bébé ! Bois jusqu'à plus soif. Je ne pourrais te nourrir comme je le devrais et comme je le voudrais.
Si souvent j’ai rêvé à ces instants magiques que nous passerions ensemble toutes les deux …
Que vont-ils faire de toi ? Vers où vont-ils t’emmener ?
Qui appelleras-tu « Maman » ? « Maman » ! Je me réjouissais tant de t’entendre prononcer ce mot … Auras-tu seulement quelqu’un a appeler ainsi ?

Mon enfant, mon bébé … ma toute petite fille … Pourras-tu un jour comprendre mon geste ? Pourras-tu un jour me pardonner de t’abandonner ainsi ?
Je t’ai aimée dés le premier instant où je t’ai sentie en moi et jusqu’à mon dernier souffle, tu resteras dans mon cœur …
Mais je dois faire cela, je dois t’abandonner. Tu es mon passé, ils ne veulent pas je garde la moindre chose de mon passé si je veux LE rejoindre … même pas toi.

Lentement, la fièvre embrumait l’esprit de la succube, troublant ses pensées, lui faisant voir des images horribles sur l’avenir de son enfant. Elle la voyait entourée de flammes … Non pas les flammes de l’Enfer mais les flammes d’un bûcher où des mains sans pitié jetaient son enfant … Encore et encore …
Cybella sursauta, tremblante. Elle s’était assoupie, la fatigue de l’accouchement et la fièvre que lui procurait la douleur de son cœur lui faisant faire des cauchemars.
Heronya s’était endormie aussi mais d’un sommeil innocent et beaucoup plus paisible, les lèvres toujours collées contre son sein.

Seigneur ! Pourquoi ? Pourquoi ne puis-je la garder ?

Je ne peux laisser faire ça !
Ils ne te feront pas de mal ! S’ils ne te veulent pas à mes cotés, ils ne t’auront pas non plus.
Heroneus ! Lui saura quoi faire, lui saura prendre soin de toi. S’il ne te veut pas comme fille, il devra t’accepter comme déchue. Tes ailes sont noires … Tu as des plumes … comme lui. Il ne peut pas refuser.

A moitié entre rêve et réalité, sous l’emprise de la fièvre et de la douleur, Cybella se leva et jeta sa cape sur ses épaules, y cachant son bébé. De son poignard, elle déchira l’arrière de la tente et s’enfonça dans la nuit. Lorsqu’elle fut suffisamment loin du camp, elle déploya ses grandes ailes de peau sombre et s’envola.
L’enfant serrée contre elle, elle traversa les terres, les rivières et les forêts pour enfin venir se poser dans la cour de dalles blanches de la forteresse de la Légion des Âmes.
Titubante, elle s’avança vers la lourde porte, hésita un moment … appeler ou simplement laisser l’enfant là, dans la cour … Mais les grognements des chiens l’empêcha d’ainsi la laisser et elle se mit à crier …

Heroneus !! Heroneus … Je t’en supplie, ouvre-moi !

Epuisée, elle se laissa glisser sur le sol, appuyée contre la porte. Sa voix ne devenant qu’un murmure, elle continua suppliante …

Heroneus … s’il te plaît … aide-moi !

Le déchu se tenait en haut des remparts, il avait senti l'aura de celle qui n'avait plus rien d'une succube s'approcher lorsqu'elle se trouvait encore à des lieux de la forteresse de la Légion des Âmes.

Cybella était visiblement épuisée, tenant fermement son enfant dans ses bras avec ce qu'il lui restait de forces.
Heroneus déploya ses ailes et alla se poser lentement à ses côtés, le regard qu'il jeta à la mère et son enfant ne traduisant qu'une profonde indifférence quant à ce qui se passait sous ses yeux.

Sans un mot, il se baissa vers Cybella pour la soulever dans ses bras, puis s'envola vers l'intérieur de la Citadelle sans se soucier de savoir si la jeune mère était consciente ou non.

Un bref instant après s'être envolé de l'entrée de la Citadelle, le déchu pénétrait dans sa chambre par le balcon, Cybella et son enfant serrés contre lui.
Il s'avança jusqu'au lit pour les y déposer tous deux doucement, puis se recula de quelques pas.

- « Et maintenant Cybella ? »

Cybella le regarda, d’abord surprise … puis, lentement, elle se détendit un peu. Elle souleva doucement la cape couvrant son enfant et, dégageant son visage, la tourna vers Heroneus.

- « C’est ta fille … Je l’ai appelée Heronya. »

- « Heronya ... tu espérais peut être qu'en donnant à ton enfant un nom vaguement semblable au mien tu arriverais à nous rapprocher l'un de l'autre ? J'avoue que l'idée est curieuse.

Je suppose que c'est la fatigue de l'accouchement qui t'as fait réfléchir aussi stupidement, toi, une succube soit disant repentie, venir te présenter chez des déchus, des créatures bannies de ce peuple que tu souhaites rejoindre, c'était vraiment une idée stupide. »

Il marque une pause le temps d'un soupir.

- « Maintenant parle, je doute que tu te sois traînée jusqu'ici uniquement pour me présenter ta fille. »

Cybella se mit à trembler … Elle devait maintenant le convaincre d’accepter son enfant, de la protéger, de l’élever … Elle ne pouvait la garder auprès d’elle, elle était en danger aussi bien face à l’Eden, étant sa propre fille que face aux Enfers, étant la fille d'un Commandeur Céleste.

L’enfant s’agita puis se mit à pleurer … Doucement, Cybella lui sourit et, dénudant l’un de ses seins lourds et gonflés, le présenta à Heronya qui s’en saisit avec gourmandise et téta avec force le précieux liquide.

Il s’approcha d’elle et doucement, tira sur elle et l’enfant l’épaisse couverture. Sa voix était calme, presque apaisante. Il ne comprenait pas, il voulait savoir ce qui l’avait ainsi fait changer, comment elle pouvait abandonner ainsi son enfant pour suivre un ange dans cette nation qu’il avait renié.
Il se rapprocha et s’assit à ses cotés. Tentant de retenir ses larmes, Cybella posa sa tête sur son épaule et laissa sortir toute sa douleur. Elle lui confia alors tout ce qui l’avait rongée en silence tout ce temps, l’espoir qu’elle avait eu, un temps, de le voir revenir auprès d’elle, la solitude face à son état, l’abandon qu’elle avait ressenti malgré la fierté qu’elle éprouvait de porter son enfant … Puis sa rencontre avec Zeratul et tout l’amour et le bonheur qu’il lui avait offert.
Elle lui parla aussi de son repentir et du bonheur qu’elle en retirait mais aussi de la Souveraine Nihilia et du Seigneur Azaël qui se disputaient son bébé pour de sombres raisons …

L’enfant s’était assoupi, les lèvres toujours collées à son sein. Elle ne le dérangea pas, se contentant de retirer sur lui la couverture, prolongeant encore un peu ce contact si intime avec sa fille.
Elle soupira profondément, semblant se calmer un peu.

Il tenta à nouveau de la dissuader de faire cela, de rester fidèle aux enfers, de rester avec son enfant. Il essaya de lui prouver que ces choix étaient basés sur de mauvaises raisons …

- « De toi à moi, s'il n'y avait pas Zeratul, ou si ton histoire avec Zeratul devait s'achever sous peu, est ce que tu aurais encore le désir de te tourner vers Dieu ?

Quant à cet enfant, il n'appartient ni aux Enfers, ni à l'Eden, toi et moi sommes des créatures sans allégeance Cybella, cet enfant n'appartient qu'à ses parents, et si tu n'es pas capable de te battre pour lui, si tu préfères l'abandonner ainsi, qu'est ce qui te fais croire que je suis prêt à le faire moi même ? Qu'est ce qui te fait croire que je ne vais pas le confier à ceux dont tu crains de voir la main se poser dessus ? »

Cybella resta un moment silencieuse, les yeux posés sur son enfant assoupi … Elle était tellement belle sa petite fille …

- « S’il n’y avait pas eu Zeratul ? Je ne sais pas. Peut-être serions-nous en train de découvrir ensemble notre enfant … Peut-être serions-nous heureux tous les trois. Peut-être aussi serais-je seule, venant de lui donner la vie quelque part dans un coin des Enfers ou sur un champs de bataille quelconque …
Je ne peux dire ce qu’aurait été ma vie s’il n’y avait pas eu Zeratul.

Mais il y a eu Zeratul ! Et tout ce qu’il m’a fait découvrir. »

Elle ferma les yeux, un léger sourire se dessina sur ses lèvres quand elle continua à parler.

- « Lorsque j’étais seule en Enfer, toute sorte de pensées sombres agressaient mon esprit : haine, douleur, violence, trahison, mort … Après avoir rencontré Zeratul, il y a eu dans mon esprit et dans mon cœur cette étrange petite lueur. Comme la flamme d’une bougie au fin fond de la nuit la plus noire. Cette flamme, plus forte, plus brillante à chaque fois qu’il était à mes cotés, diminuait quand je m’éloignait de lui sans néanmoins s’éteindre tout à fait. Jusqu’au jour où je n’ai plus pu supporter qu’elle diminue et où je l’ai suivi.

Depuis que je suis auprès d’eux, cette lumière ne me quitte plus, parfois même … Quand je Lui parle, quand je Lui demande de me donner la force de faire ce que je suis en train de faire … la Lumière devient plus forte, plus chaude encore … Je ne veux plus perdre ses moments de sérénité.
J’ai confiance, si je devais perdre Zeratul, je sais qu’Il ne m’abandonnerait pas, qu’Il ne me laisserait pas retourner dans les Ténèbres.

Cette enfant est ma punition. La douleur de me séparer d’elle est le prix à payer pour me racheter de mes erreurs passées. Cette plaie qui restera à jamais béante au fond de moi me rappellera à jamais d’où je viens.
Je te la confie, à toi … Tu es son père. Si tu penses qu’il est bien pour elle qu’elle retourne aux Enfers … Fais ce qui doit être fait … »

Le déchu repoussa lentement la succube pour se redresser, et commença à tourner dans la chambre, les bras croisés dans le dos. Il vint finalement se positionner face à elle, son regard se faisant plus sombre lorsqu'il reprit la parole.

- « Et bien soit, je vois que tu as pris ta décision, aveuglée par ton amour, effrayée par la solitude, je me moque de la raison qui t'a poussé à agir de la sorte, toujours est il que tu n'es plus la Cybella que j'ai connu par le passé.
Tu n'es désormais plus qu'une créature hybride recherchant sa place au sein de la Nation que je vomis, et à ce titre, je prie le ciel pour ne plus jamais croiser ta route sitôt que tu auras disparu de ma vue ce soir.
Vis pour ton amour, vis pour tes illusions, et meurs pour eux, si cette fois tu es capable d'aller jusqu'au bout de tes souhaits. »

Il baissa les yeux vers le bébé.

- « Quant à cet enfant, soyons clair, si cet enfant est une erreur, une punition, dans ce cas il sera traité comme tel.
Qu'il vive ou qu'il meurt, je m'en contrefous, il aura un avenir aussi longtemps qu'il ne se mettra pas en travers du mien, et si jamais je peux tirer un quelconque profit par sa vie ou sa mort, sache que je n'hésiterais pas une seule seconde.
Puisque pour toi cet enfant ne sera jamais qu'un instrument pour arriver à la rédemption, il restera un instrument.

Maintenant pars, cet enfant n'est plus le tien, laisse le et vas retrouver celui que tu aimes, et prie ton Seigneur pour ne jamais croiser la route de quelqu'un qui me soit redevable. »

Une douleur terrible tortura les entrailles de la succube aux paroles de Heroneus.
Tout était dit … tout était fini. Quand à son enfant, il s’en fichait mais il acceptait qu’elle le laisse ici.
Elle rechercha une dernière fois dans son regard un éclair de compassion, une infime trace du Heroneus qu’elle avait connu jadis, qu’elle avait aimé … Mais il n’y avait plus rien de cela dans le regard sombre qu’il posait sur elle.

Elle se leva lentement, serrant sa fille contre elle. Elle l’embrassa longuement, lui parlant doucement …

- « Adieu ma douce … Adieu ma toute petite fille. Je t’aime … Peut-être ne le sauras-tu jamais, mais je t’aimerai toute ma vie.
Je prierai le Seigneur, je lui demanderai de veiller sur toi … malgré tout. »

Elle l’embrassa une dernière fois et l’éloigna d’elle doucement. Le visage plein de larmes, elle posa Heronya dans les bras du déchu et se dirigea vers le balcon.

La petite se mit à hurler …
Le cœur brisé … sans se retourner … elle déploya ses ailes de peau sombre et plongea dans le vide …

Le corps fiévreux et en sueur, le cœur brisé, la succube vola droit devant elle d’un vol lourd et incertain, jusqu’à ce que l’épuisement et la souffrance lui fit perdre connaissance et s’écraser sur le sol d’une forêt, parmi les arbres …

Cybella ouvrit les yeux. Elle se trouvait au centre d’une petite clairière, couchée dans l’herbe verte et douce. Un parfum de fleurs lui chatouillait les narines et les rayons du soleil caressaient sa peau nue. Les hauts arbres secouaient au gré du vent léger leurs branches fleuries semant alentour leurs pétales multicolores tandis que les oiseaux mêlaient leurs chants mélodieux à celui, clair et cristallin d’une rivière.
Elle se leva lentement, regardant, émerveillée, cet endroit empreint de calme et de sérénité. Un jeune faon sorti du sous-bois, s’arrêta un instant, la regardant, puis d’un pas confiant, s’avança vers la rivière pour s’y désaltéré. Des écureuils se poursuivaient de branches en branches et des lapins gambadaient à ses pieds comme si la voir là était tout à fait naturel …

Cybella !

Cybella se retourna, souriante, cherchant des yeux celui qui venait de prononcer son nom.

Cybella !

Oui ? Où es-tu ? Pourquoi te caches-tu ?
Qui es-tu ?

Je suis celui qui EST. Je suis la LUMIERE.

Es-tu celui qu’ils appellent « Seigneur » ? Es-tu leur Père ?

Je le suis. Je suis le père de toute chose vivant en ce monde.

Que veux-tu de moi, Père ?

Regardes et souviens-toi !

L’obscurité et le silence se firent soudain autour d’elle et des images lui apparurent.
Une jeune succube environnée de flammes, surgissant à la vie, hurlant sa rage et sa haine … Des nuits passées en compagnie de ses sœurs dans des lieux de débauches, de beuveries et de sexes … Une nuit de solstice en compagnie d’un ange déchu … Une autre, d'amour, dans les bras d'un ange pur … Un enfant naissant dans la douleur et hurlant alors que sa mère s’arrachait à lui … Et tout ce sang versé au nom des Enfers se répandant dans le sol, pourrissant la terre …

Les images terribles disparurent, la lumière revint et Cybella retrouva la jolie clairière. Mais quelque chose avait changé. Là-bas, un peu plus loin, un corps était étendu dans l’herbe tendre. Un corps semblant sans vie … une mare de sang foncé s’étendant lentement entre ses jambes. Un manteau sombre tâché de sang la recouvrait à demi laissant apercevoir sur son visage une expression de douleur extrême déformant ses traits fins.

C’est moi n’est ce pas ! Suis-je morte ?

Non, tu ne l’es pas encore.
Tu as le choix maintenant : mourir et oublier toute cette souffrance qui te détruit lentement. Dans ce cas, ayant déjà renié tes Enfers, tu erreras éternellement dans l’immense solitude sans fin des limbes.
Ou vivre … En gardant à jamais au fond de ton âme, comme un incessant rappel à l’ordre, les pleurs de ton enfant et les cicatrices de tes erreurs passées.
Dans ce cas, tu pourras vivre dans ma Lumière, aux cotés de cet ange qui t’a amené vers moi.

L’image de Zeratul apparut soudain dans la forêt. L’ange était à genou dans la tente où elle avait donné naissance à son enfant, le front appuyé contre la couche désertée.
En proie à un doute soudain, des mots sans suite s’échappaient de sa bouche …
« Pourquoi … trop dur pour elle … je le savais … elle est partie avec l’enfant … je n’aurais pas dû les laisser faire … je n’aurais pas dû … »
Le cœur de Cybella se serra et elle courut vers l’image mais elle eut à peine le temps de poser la main sur l’épaule de l’ange que la vision disparut.

Zeratul !
Il croit que j’ai fuis … JE VEUX VIVRE ! Quel qu’en soit le prix, je crois que j’en ai déjà payer la plus lourde part. Je veux le rejoindre !

Cybella se sentit soulevée, emportée … et son esprit rentra dans son corps.
La succube se releva lentement et un hurlement de douleur s’échappa de sa gorge.

Seigneur … Dis-moi ce que tu attends de moi !

Déshabille-toi et entre dans l’eau. Nettoie ton corps et purifie ton âme, si ton cœur est suffisamment pur pour me rejoindre, je te guiderai vers moi !

Arrivée au milieu de la rivière, une colonne d’eau l’entoura, la soulevant, la retournant … la faisant voler comme un simple fétu de paille jusqu’à ce qu’elle perde connaissance et que la colonne l’entraîne au fond des flots en furie.
La rivière était maintenant calmée depuis un long moment quand quelques bulles remontèrent vers la surface, en troublant la quiétude. Cybella émergea lentement de l’eau, s’avança vers la berge et, après quelques pas hésitant sur l’herbe, s’arrêta et regarda son corps.
Elle était la même pourtant elle se sentait différente … plus forte, plus puissante. Elle était calme, paisible bien qu’une plaie à jamais ouverte martyrise son âme. Elle sourit, tomba à genoux et leva les yeux au ciel.

Ordonne Seigneur et je t’obéirai !

Rejoins Zeratul … Rejoins le G.A.R.D.E. … Présente-toi devant Raziel, dis-lui que tu es devenue une Pénitente et que je t’envoie vers lui !
Reste toujours dans ma Lumière !

Cybella se rhabilla.
Le manteau sale et sombre qu’elle jeta sur ses épaules avait prit une couleur laiteuse et légèrement nacrée. De loin, le capuchon dissimulant à demi son visage, elle aurait pu passer pour un ange si ce n’était ses ailes de peau sombre qu’elle devait replier soigneusement et dissimuler sous le manteau.
Jetant un dernier regard autour d’elle comme pour fixer dans sa mémoire la beauté de cet endroit, elle ouvrit ses ailes de peau sombre et s’éleva vers le ciel bleu. Le G.A.R.D.E. était loin … Il lui faudrait du temps pour les rejoindre. Elle avait hâte de retrouver Zeratul et de se blottir dans ses bras.

Le campement était enfin en vue. Tout était silencieux … Cybella se posa doucement près de la tente et entra par le trou qu’elle avait fait pour sortir.
Son cœur se serra … Sa vision lui revint en mémoire : Zeratul à genoux dans la tente !

Elle s’avança doucement et posa tendrement la main sur ses cheveux, les caressant et s’agenouilla à ses cotés. Son manteau blanc à la capuche cachant à moitié son visage devait lui donner l’air d’un fantôme … Elle releva le capuchon et le regarda en souriant. Elle prit son visage entre ses mains, noyant son regard sombre dans ses yeux bleus.

Mon ange, mon tendre amour … Je suis là, je suis revenue près de toi pour ne plus jamais te quitter.
Heronya est maintenant auprès de son père, auprès des siens et moi …

Regarde en moi mon ange … regarde mon âme. Dis-moi que je n’ai pas rêvé, que tout cela était vrai.
Dis-moi qu’Il a changé quelque chose en moi !

Il a fait de moi une Pénitente … Je dois le dire à Raziel.

Un sourire éclatant illuminait son visage, elle posa tendrement ses lèvres sur les siennes …

Non, je n’ai pas rêvé … je le sens, je le sais !