Petite leçon de cuisine.

Là-haut …

Angélique montra, d’un signe de tête, le haut de l’étagère à la petite chérubine sans trop quitter du regard la pâte qu’elle pétrissait de ses mains blanches.
Zerine posa son panier sur l’armoire et leva la tête, suivant le geste d’Angélique. Trop haut … elle était trop petite, comme toujours. Mais qu’à cela ne tienne, elle déploya ses ailes et, d’un brusque battement, elle s’éleva. Elle saisit solidement entre ses bras le grand saladier de fine porcelaine blanche à petites fleurs bleues, et se laissa lentement redescendre.
Quelle ne fut pas sa surprise de se trouver soudain plongée dans un étrange brouillard, épais et opaque … Elle éternua bruyamment tandis que le cri d’Angélique retentissait.

- « Zerine ! Non, ne vole … pas … »

Mais trop tard … toute la blanche farine qu’était en train de travailler l’angelle se reposait maintenant lentement, telle une fine neige poudreuse, sur tout ce qui se trouvait dans la cuisine.

- « Ooooopsss ! »

Angélique éternua à son tour essayant, avec des gestes de sa main pleine de pâte, de chasser la farine qui se posait sur son visage.
Zerine, le saladier serré contre elle, regardait le désastre en se mordillant les lèvres, ne sachant pas trop si elle devait se mettre à pleurer ou éclater de rire.
C’est Angélique qui la décida en mêlant éclats de rire et éternuements.

- « Ze … ze vais tout nettoyer, promis. »

- « Je sais ma belle, nous nettoierons tout cela quand nous aurons mis cuire le repas.
Mais, montre-moi donc ce que tu as trouvé. »

Zerine posa le saladier sur la table et montra à Angélique son petit panier où elle avait mis la récolte qu’elle avait faite pour faire une surprise à son papa.

- « Regarde ! Z’ai trouvé pleins des fruits de toutes les sortes et de toutes les couleurs mais z’ai pas pris les noirs comme tu m’as montré. Ils sont zolis hein. Il en manque zuste un peu … »

Ajouta t-elle en essuyant machinalement sa bouche d’un revers de main.

- « Pi z’ai aussi des champignons, des zolis pi des moins zolis mais ze sais pas s’ils sont tous bons. »

Angélique posa un regard expert sur le panier et en sorti un champignon vert, le montrant à l’enfant.

- « Regarde, celui-ci n’est pas bon à manger. Si tu en vois, surtout tu ne les manges pas. D’accord ?
Bien, alors dis-moi, que veux-tu faire de bon avec tout cela ? »

Zerine réfléchit tout en regardant le panier et en passant une langue gourmande sur ses lèvres. Elle aimait bien tout ce qu’Angélique savait faire avec tout ça et ne parvenait pas à se décider.
Pendant ce temps, l’angelle avait réussi à finir sa pâte, en avait fait des petites boules qu’elle glissa dans le four bien chaud et se mit à nettoyer soigneusement la grande table avant de regarder à nouveau l’enfant.

- « Tu ne sais pas te décidé n’est-ce pas ?
Alors … avec tout ça, tu pourrais faire … hmm … une délicieuse salade aux quatre fruits et une fricassée de champignons. Peut-être aussi une petite soupe aux champignons et, si il te reste des fruits comme ça après, je te donnerais ce qu’il te manque pour faire un délicieux chocolat.
Cela te convient ? »

- « Hmmmmouiiii ! C’est très bon tout ça, surtout le chocolat … »

Angélique prit un grand tablier blanc qu’elle noua autour de la chérubine et prépara quelques ustensiles sur la table.

- « Tu vas d’abord laver tous les fruits et les nettoyer comme je vais te montrer, ensuite tu les coupes et les mets dans le saladier. D’accord ? »

Zerine regarda Angélique puis, un bout de langue coincé entre les dents en signe de concentration, elle nettoya tous les autres fruits en commençant par les petits rouges qui n’avaient pas besoin d’être coupés, puis les bleus qu’il fallait juste coupés en deux. Puis vint le tour des marrons, eux il fallait leur enlever la peau et les couper en deux mais elle s’assura d’entre mettre suffisamment sur le coté pour faire du chocolat. Et enfin, elle passa aux verts qui demandaient plus de travail parce qu’ils étaient plus gros, qu’il fallait les éplucher comme il faut et enlever tous les pépins à l’intérieur avant de les couper en petits morceaux.
Elle ajouta le sucre et les essences de fleurs que lui avait préparé l’angelle et mélangea soigneusement avant de relever la tête et d’appeler Angélique.

- « Anzélique, ze dois mettre la crème maintenant ? »

- « Non ma belle, pas maintenant, on va mettre le saladier dans la glacière, avec la crème, jusqu’au moment de servir et on la mettra avant de le porter à table.

On va passer aux champignons, d’accord ? Je vais t’aider à les nettoyer. »

Les deux cuisinières s’affairèrent autour du panier de champignons, les brossant et les coupant et elles en firent deux tas.
L’un des tas alla dans une grande sauteuse où elles les firent cuire avec plusieurs sortes d’herbes et d’épices parfumées. Un délicieux fumet s’en dégageait et se répandait dans toute la cuisine jusque dans la salle où les membres du G.A.R.D.E. prenaient leurs repas.
Alors que l’autre tas rejoignait une grande marmite pleine d’eau pure de Kimora. Là aussi, elles ajoutèrent des herbes et des épices et la firent cuire.

Le regard soudain brillant, Zerine regarda Angélique.

- « Maintenant, le chocolat ! »

- « Hmm … je vais voir si j’ai tout ce qu’il faut … »

- « Eeeeeh ! T’as dit que t’avais ! »

Angélique éclata de rire en se dirigeant vers le garde-manger et en sortit de la graisse et des œufs bien frais.
Elle posa le tout sur la table et expliqua à Zerine comment faire.

La petite écrasa d’abord soigneusement les fruits dans le grand bol et les mélangea avec la graisse en faisant une belle pâte bien lisse. Elle cassa ensuite les oeufs dans un autre bol et les mélangea au fouet avant de les ajouter dans le premier bol où elle mélangea enfin le tout.

Zerine ne put s’empêcher de pousser son doigt dans le mélange et de le lécher avec un plaisir bien évident de gourmandise …

- « Je t’ai vue ! »

- « Hmmm … ch’est crop bonnnnnn !
Dis Anzélique, tu crois que papa va aimer tout ce que ze lui ai fait ? »

- « Bien sûr qu’il va aimer puisque c’est toi qui le lui as préparé. »

Elle redressa fièrement la tête, bien sûr qu’il allait aimer, il ne pouvait pas ne pas aimer. Elle alla alors près d’Angélique pour qu’elle lui dénoue son tablier. Cette dernière la regarda, les poings sur les hanches.

- « Dites donc jeune demoiselle, vous n’oubliez pas quelque chose ? »

Zerine fronça les sourcils, regarda Angélique d’un air concentré puis regarda autour d’elle et … se souvint de la farine partout …

- « Ooooops … z’avais oublié … Ze vais nettoyer … »

Elle soupira et alla chercher un torchon pour tout nettoyer, sous le regard amusé d’Angélique qui s’empara d’un balai et l’aida à tout ranger.

- « Dis Anzélique … ze suis une cuisinière maintenant ? »

- « Oui ma belle, tu es une vrais cuisinière maintenant. »

Heureuse, l’enfant se mit à tout nettoyer en chantonnant …